En Haïti, les autorités étatiques ne garantissent pas un contrôle adéquat des produits de consommation. La présence du microbe Escherichia coli dans les salamis en provenance de la République dominicaine, des produits destinés exclusivement à la consommation haïtienne, et la récente étude menée par l’Université du Michigan sur le riz américain exporté en Haïti sont autant de preuves de faiblesses dans le contrôle exercé sur les produits de consommation. Une réalité qui perdure malgré ces révélations et les méfaits liés à cette situation.
En 2012, la nouvelle de la présence du microbe Escherichia coli dans des saucissons dominicains a fait écho en Haïti. Elle a révélé ainsi la négligence en matière de surveillance des produits de consommation importés. Mais bien avant ce scandale, nous avions connu vers les années 90 l’affaire des Laboratoires Pharval, ayant causé la mort de plus de 70 enfants.
Récemment, une étude effectuée par l’Université du Michigan a démontré la présence de substances malsaines, voire cancérigènes dans le riz américain importé en Haïti. Ces faits démontrent un laisser-aller des autorités concernées dans le contrôle des produits sur le marché haïtien. De plus, cette négligence ne concerne pas uniquement les produits importés.
Protection du consommateur en Haïti, le cadet des soucis de l’Etat
Alors que la nécessité d’une vérification adéquate des produits de consommation est négligée en Haïti, la notion de défense du consommateur l’est encore plus. Apparue avec la société de consommation, aux États-Unis dans les années 1960, la supervision des produits de consommation, qu’ils soient locaux ou importés, est d’une importance capitale et relève de la responsabilité de l’État.
D’après le module 7-2 de l’Organisation pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), le contrôle des aliments est crucial, car il assure la disponibilité d’aliments sains, nutritifs et de haute qualité. Ce module traitant l’importance d’un contrôle alimentaire national explique que l’accès à des aliments sains, dans lesquels le consommateur a confiance, fait partie des besoins fondamentaux de la personne. Il revient à l’Etat de s’assurer que ce besoin soit couvert.
Pour les producteurs locaux, la responsabilité de l’État est essentielle pour garantir le respect des normes sanitaires et environnementales en vigueur. Cela assure que les consommateurs ne sont pas exposés à des risques contre leur santé en consommant des produits contaminés ou dangereux. De plus, cela promeut des pratiques de fabrication responsables et durables, favorisant ainsi la protection de l’environnement et le soutien au développement économique local.
Et pour les producteurs internationaux, le contrôle des produits est essentiel. Avec la mondialisation, de nombreux aliments sont importés quotidiennement. Les règles en vigueur en matière de contrôle des produits de consommation dans un pays ne sont pas les mêmes dans tous les autres pays. En effet, un produit, pour des raisons inavouées, peut être fabriqué dans un pays pour l’exportation, tel est le cas de certains produits avec notification « exclusivement pour… ».
Les défis liés aux contrôles sanitaires des produits en Haïti
Le contrôle des produits de consommation en Haïti fait face à de nombreux défis. Selon Me Louis-Kenson BASSE, avocat spécialiste en droit des affaires, la liberté en matière d’importation sur le marché haitien pose un problème majeur en termes de contrôles sanitaires des produits importés.
L’avocat souligne que l’absence de contrôles de qualité ne joue pas en notre faveur. Elle est perçue comme un avantage pour certains acteurs économiques, favorisant ainsi l’introduction sur le marché local des marchandises de qualité inférieure ou non conformes aux normes sanitaires, lesquelles peuvent entraîner des conséquences néfastes à long terme.
Préjudices liés à la consommation de produits défectueux ou contaminés
Dans certains pays comme les États-Unis, le Canada et plusieurs nations européennes, des lois strictes sont en place pour protéger les consommateurs. En revanche, cette protection est quasiment absente en Haïti, souligne Me Louis-Kenson BASSE.
Cependant dans le cas de préjudices liés à la consommation de produits défectueux ou contaminés, bien qu’il n’y ait pas de lois de protection des consommateurs en Haïti, le spécialiste en droit des affaires cite l’article 1168 du code civile haitien indiquant : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Se basant sur cet article, une personne peut avoir recours personnel ou collectif pour demander réparation contre un quelconque préjudice causé.
La protection des citoyens constitue le respect de l’un des droits fondamentaux dans un pays. Selon l’article 3 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) de 1948, tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne.
L’absence ou l’insuffisance de contrôle sur les produits consommés constitue une grave entorse aux droits des individus, exposant ces derniers à des risques pour leur santé et leur sécurité. Par conséquent, il revient à l’État de veiller à ce besoin essentiel afin de garantir le droit à la sécurité de ses citoyens.
Pour la rédaction de cet article, nous avons tenté à plusieurs reprises d’entrer en contact avec les institutions étatiques concernées afin de recueillir leurs perspectives et leurs réponses concernant le sujet abordé. Malheureusement, nos efforts sont restés vains. Toutefois, nous restons ouverts à toute collaboration future et sommes prêts à mettre à jour cet article en cas de réponse de leur part.
John Stanley Gérald Mervil